Vie liturgique et sacramentelle

Les sacrements dans l'Église orthodoxe

Christ Pantocrator. Icône de Grégoire Krug (1964-65)
Remerciements à l'Église orthodoxe à Vanves (France)

 

Les sacrements sont des actes sacrés par lesquels l'Église communique aux fidèles la grâce du Saint Esprit. Les sacrements servent à la sanctification des membres de l’Église en les purifiant de leurs péchés et leur donnant les forces indispensables au salut. Les sacrements sont aussi appelés les « mystères » à cause de la dualité de ce qui est visible (signe extérieur) et invisible (grâce spirituelle) dans chaque sacrement. L’Église par son rituel sanctifie la matière qui est utilisée dans les sacrements - l’eau, le pain, le vin, l’huile -, qui deviennent des instruments de l’Esprit Saint, grâce à l’épiclèse, l’invocation de l’Esprit Saint. L’Orthodoxie rejette toute tentative de diminuer la matérialité des sacrements, car la personne entière, corps et âme, est appelée à participer à la liturgie sacramentelle.

En même temps, il n’y a pas de magie dans les sacrements ; aucune parole, aucune formule ne peut avoir en elle-même la valeur sacramentelle. C’est l’administration du sacrement par l’Église qui confère l’efficacité salvatrice au signe extérieur. Le sacrement est une aide nécessaire au salut que Dieu accorde aux hommes afin de les libérer des péchés et de transformer leur vie. Il y a donc les sacrements qui libèrent l'homme du joug du péché et ceux qui organisent la vie du chrétien sur cette terre.

L’Église orthodoxe reconnaît sept sacrements, mais ce nombre n'est pas dogmatique. L'Église accepte des actes sacramentaux parallèles aux sept sacrements et qui possèdent la même force spirituelle. Ce sont notamment : la profession monastique ; les funérailles ; la consécration d'une église, d’un autel et du saint chrême ; et la grande consécration des eaux de la Théophanie. 


LE BAPTÊME : Le baptême est conféré par triple immersion dans l’eau, un rappel des trois jours du Christ dans le tombeau ainsi que l’insertion du baptisé dans la Sainte Trinité. Le baptême signifie l’ensevelissement mystique et la résurrection avec le Christ, dont le signe extérieur est l’immersion du candidat dans l’eau et son émergence en homme nouveau. Le baptême par infusion ou aspersion n’est permis que dans des situations exceptionnelles. Une personne venant à l’Église orthodoxe d’une autre confession chrétienne peut recevoir ou ne pas recevoir un nouveau baptême ; la pratique varie selon les Églises.

Le baptême des enfants, de même que des adultes, comprend typiquement toutes les étapes de l’initiation chrétienne ; le rite baptismal est suivi de la chrismation et de la communion, ainsi que des rites de l’ablution et de la tonsure. Une personne, sans distinction d'âge, qui devient un membre du Christ en reçoit en même temps tous les privilèges.

Par le baptême, non seulement nous recevons l’absolution des péchés, mais nous sommes incorporés au Christ, comme nous le rappelle saint Paul : Vous tous, qui avez été baptisés en Christ, vous avez revêtu le Christ (Ga 3,27). Les orthodoxes portent normalement une petite croix sur une chaîne au tour du cou, signe de cette appartenance au Christ par le baptême.: 


LA CHRISMATION : La chrismation ou onction avec le saint chrême (du grec, chrisma, « onction ») suit normalement le baptême. Le saint chrême est consacré par les primats des Églises et est envoyé par eux aux évêques de leur juridiction. La chrismation est administrée par un prêtre, qui fait un signe de croix sur le front, les yeux, les narines, la bouche, les oreilles, la gorge, les mains et les pieds du candidat, disant chaque fois : « Le sceau du don de l’Esprit Saint. » Car c’est par la chrismation que le baptisé reçoit le don de l’Esprit, devenant ainsi membre à part entière du peuple de Dieu ; il partage, dans le Christ, la royauté, la prophétie et le sacerdoce du « peuple royal ».

La chrismation sert souvent de rite d’admission dans l’Église orthodoxe pour ceux qui viennent d’autres confessions chrétiennes. Le saint chrême est le symbole de l'unité de l'Église.


L'EUCHARISTIE : L'eucharistie, le sacrement par excellence, forme le centre de la vie sacramentelle. Il est le sacrement à la fois de la parenté des fidèles en Jésus Christ et de leur unité dans le partage du même calice ; il est le fondement de toutes les relations entre les croyants et la base de toute la vie chrétienne. Avant tout, l’Eucharistie est une offrande, celle du Christ lui-même, une offrande à la Trinité, offrande actualisée par l’acte liturgique : « Ce qui est à toi, le tenant de toi, nous te l’offrons en tout et pour tout », dit le prêtre au moment de l’élévation. Le Christ est en même temps celui qui offre et celui qui est offert au Père, dans l’Esprit.

 Les orthodoxes croient que la consécration du pain et du vin pendant la Divine Liturgie les transforme vraiment en Corps et Sang du Christ ; il ne s’agit pas de simples symboles, mais d’une réalité mystique. Cependant, l’Église orthodoxe ne s’est jamais prononcée sur la manière dont le changement est effectué, ni sur la mode de la présence du Christ, car il s’agit d’un mystère qui demeure incompréhensible. Le pain et le vin consacrés sont normalement entièrement consommés pendant ou immédiatement après la célébration eucharistique. Dans la pratique russe, les fidèles ayant communié prennent aussi du pain et du vin bénis, mais non consacrés, immédiatement après la communion.

La communion se fait toujours « sous les deux espèces » du pain et du vin. Le clergé communie au pain et au vin séparément et le prêtre donne la communion aux fidèles dans une cuiller contenant un morceau de pain imbibé de vin. Ceux qui communient doivent jeûner avant la communion, normalement depuis minuit la veille pour une liturgie célébrée le matin, et au minimum sept heures avant une liturgie en soirée. La pratique de la communion fréquente devient plus répandue de nos jours qu’autrefois, notamment parmi les orthodoxes « occidentaux. »

 L’Église orthodoxe n’admet à la communion que les orthodoxes ayant observé les prescriptions canoniques, par exemple le jeûne préalable. Car la participation à la communion est signe de la fraternité et de la solidarité de tous ceux qui partagent la même coupe, confessant ainsi la même foi et faisant partie de la même Église. À la fin de la liturgie, ceux qui ont assisté à la célébration, sont invités à recevoir un morceau de pain, appelé antidore, béni mais non consacré pendant la liturgie.


LA PÉNITENCE OU CONFESSION : La confession est à la fois l’acte de reconnaître son état de pécheur, d’avouer ses fautes avec contrition et de se remettre sur la voie de la conversion, et aussi de « confesser » le Seigneur qui est bon, de reconnaître sa miséricorde infinie. Par la confession, les péchés commis après le baptême sont pardonnés et le pécheur est réconcilié avec l’Église.

Dans la pratique orthodoxe, il n’y a pas de « confessionnal », mais le prêtre et le pénitent restent debout, souvent devant une table ou un lutrin sur lequel sont placées une croix et l’Évangéliaire. Après avoir reconnu ses péchés, le pénitent s’agenouille ou s’incline la tête et le prêtre place l’étole sur sa tête pendant qu’il prononce la formule de l’absolution, faisant le signe de croix sur la tête du pénitent à la fin. L’imposition d’une pénitence n’est pas obligatoire, mais il arrive que le prêtre propose des conseils spirituels aux fidèles.


L'ORDINATION : L'Église orthodoxe compte trois ordres majeurs : diaconat, prêtrise et épiscopat ; et deux ordres mineurs : lectorat et sous-diaconat. Seul un évêque peut conférer l’ordination et les ordinations aux ordres majeurs sont toujours célébrées pendant une liturgie. Deux évêques au minimum sont nécessaires pour ordonner un nouvel évêque.

Les diacres et les prêtres peuvent être mariés pourvu que le mariage précède l'ordination. Les prêtres non mariés professent normalement les vœux monastiques, car ils ne peuvent pas se marier après leur ordination. Les évêques, qui sont habituellement choisis parmi les moines, ne peuvent pas être mariés. Les évêques sont généralement nommés par le Saint Synode d’une Église autocéphale, mais dans quelques Églises les évêques sont choisis par les membres du diocèse, clergé et laïcs.

  • Ordinations (lecteur, sous-diacre, diacre, prêtre, higoumène)

LE MARIAGE : Le mariage est considéré par l’Église orthodoxe comme une voie de sanctification du couple établie et bénie par le Christ lui-même ; le Christ a notamment béni le mariage par sa présence aux noces de Cana et par le miracle du vin (Jn 2, 1-11). Dans le mariage, ce sont l’homme et la femme qui deviennent, chacun pour l’autre, le principal moyen de sanctification.

Le mariage dans l’Église orthodoxe comprend deux rites, qui sont normalement administrés l’un après l’autre : l’office des fiançailles, au cours duquel les époux échangent les anneaux en vue d’une union librement consentie ; et l’office du couronnement des époux, qui est le sacrement proprement dit. Les couronnes placées sur les têtes des époux sont les signes extérieurs du sacrement, symbolisant la réception de la grâce de l’Esprit Saint. Elles sont à la fois des couronnes de joie et de martyre, car le vrai mariage implique le sacrifice de soi-même pour le bien du couple. Par le mariage, l’accord entre les époux est sanctifié dans le mystère de l’Église, par l’amour qui les unit, tout comme l’amour unit le Christ à l’Église. Dans la théologie orthodoxe, c’est le prêtre et non le couple qui est le ministre du sacrement du mariage. Un mariage contracté hors de l’Église orthodoxe est considéré comme valide, mais non sacramentel.

L’Église orthodoxe admet le divorce et un deuxième mariage, voire même un troisième, avec une réticence qui est reflétée dans le rituel, lorsque le premier s’est avéré un échec. Le divorce est considéré comme une concession exceptionnelle, regrettable mais inévitable, à cause de la faiblesse de notre nature ternie par la chute. L’Église orthodoxe est plus soucieuse de porter secours et réconfort aux personnes concernées, que de préserver à tout prix une union qui n’a plus de sens.


L'ONCTION DES MALADES : Le sacrement de l'onction des malades apporte non seulement la guérison du corps, mais aussi le pardon des péchés. Ce sacrement est destiné à n'importe quel malade, quelle que soit la gravité du cas. Il a donc deux aspects, un visant la guérison du malade, l’autre sa préparation à la mort. Au sacrement des huiles se rattachent les autres actes d'onction : pendant le baptême, pour la consécration d’une église, pendant l’office des vigiles et pour la bénédiction des icônes.


Extrait de : Paul Ladouceur, Rencontre avec l’Orthodoxie,
2e édition révisée, Éditions Alexandre, Montréal, 2015.


 

Dernière modification: 
Dimanche 11 juin 2023