Foi orthodoxe

L'Église orthodoxe aujourd'hui

L'Église Sainte-Sophie de Constantinople

L'église Sainte-Sophie de Constantinople


L’Église, Corps mystique du Christ
Organisation de l’Église orthodoxe
L’Orthodoxie en Europe d’expression française
L’Orthodoxie en Amérique du Nord et au Québec
Tableau : Les orthodoxes dans le monde
Pour aller plus loin

L’Église, Corps mystique du Christ


LE PÈRE VOUS DONNERA
UN AUTRE PARACLET

Je prierai le Père et il vous donnera un autre Paraclet, pour qu’il soit avec vous à jamais, l’Esprit de Vérité, que le monde ne peut pas recevoir, parce qu’il ne le voit pas ni ne le reconnaît. Vous, vous le connaissez, parce qu’il demeure auprès de vous et qu’il est en vous... Le Paraclet, l’Esprit Saint, que le Père enverra en mon Nom, lui, vous enseignera tout et vous rappellera tout ce que je vous ai dit (Jn 14, 16-17 ; 26).

Ils virent apparaître des langues qu’on eût dites de feu ; elles se partageaient et il s’en posa une sur chacun d’eux. Tous furent alors remplis de l’Esprit Saint (Ac 2, 3-4).

Ainsi, nous, à plusieurs, nous ne formons qu’un seul corps dans le Christ (Ro 12, 5).

Puisqu’il n’y a qu’un pain, à nous tous nous ne formons qu’un seul corps, car tous nous avons part à ce pain unique (1 Co 10, 17).

Puis je vis un ciel nouveau, une terre nouvelle - car le premier ciel et la première terre ont disparu, et de mer, il n’y en a plus. Et je vis la Cité sainte, Jérusalem nouvelle, qui descendait du ciel, de chez Dieu ; elle s’est fait belle, comme une jeune mariée parée pour son époux. J’entendis alors une voix clamer du trône : « Voici la demeure de Dieu avec les hommes » (Ap 21, 1-3).

La vision orthodoxe de l’Église repose sur la promesse du Christ, la veille de sa Passion, d’envoyer le Saint Esprit sur ses disciples (Jn 14,16-17) et la réalisation de cette promesse le jour de la Pentecôte (Ac 2,3-4).

La conception orthodoxe de l’Église est trinitaire : l’Église est une icône, c'est-à-dire une image, de la Sainte Trinité, illustrant le mystère de l’unité dans la diversité : " Dans la Trinité, les trois Personnes sont un seul Dieu et cependant chacune est une personne complète ; de la même manière l’Église unit en elle la multitude des êtres humains, mais en préserve la diversité personnelle inaltérée " (Mgr Kallistos Ware). De même qu’à l’intérieur de la Trinité les Personnes sont autonomes et égales, ainsi l’Église est composée d’Églises autocéphales indépendantes et aucune d’entre elles, ni aucun évêque, ne peut prétendre à un pouvoir absolu sur les autres Églises ou évêques.

L’entité fondamentale de l’Église est donc l’Église locale : les chrétiens d’un endroit défini, regroupés autour de leur évêque, assisté par les prêtres et les diacres. Sous l’inspiration de l’Esprit Saint, c’est l’évêque, en tant que successeur des Apôtres, qui assure l’unité de l’Église locale, et c’est la conciliarité des évêques qui assure l’unité de l’Église entière. Un Concile est une expression de la nature trinitaire de l’Église, car de même que les personnes de la Trinité agissent en unité, l’Église agit en unité lorsque les évêques décident d’un commun accord. C’est pour cette raison que les orthodoxes attachent beaucoup d’importance aux sept Conciles œcuméniques et considèrent qu’aucun Concile tenu depuis 787 ne mérite d’être appelé " œcuménique ", c'est-à-dire dont les décisions sont valables pour l’Église entière.

La conception orthodoxe de l’Église est aussi eucharistique et christologique : le mystère de l’Église se réalise et se vit essentiellement à travers le mystère eucharistique. L’ex-pression " Corps du Christ " s’applique à la fois à la Sainte Communion et à l’Église. Ceux qui partagent la communion au Saint Corps et au Précieux Sang du Christ deviennent et sont le Corps du Christ, l’Église. C’est pour cette raison aussi que l’Église orthodoxe tient à ce que seuls les orthodoxes communient à la Divine Liturgie, car partager la même coupe, c’est partager la même foi, c’est aussi être " en communion " avec tous ceux qui ont mangé et bu de cette coupe - l’Église est le rassemblement autour du repas eucharistique, elle est l’unité des croyants, le " peuple royal ", réuni pour la " fraction du pain " et la " bénédiction de la coupe " (cf. Ac 2,42-46). La théologie de l’Église orthodoxe est avant tout une théologie de communion.

L’Église est pneumatologique (de l’Esprit) dans la mesure ou l’Église est le prolongement de la Pentecôte, de la descente de l’Esprit Saint sur les Apôtres, événement qui, toujours et sans cesse, forme et constitue l’Église. La Pentecôte est accomplie et vécue lors de chaque rassemblement eucharistique : " Nous t’invoquons, nous te prions et nous te supplions : envoie ton Esprit Saint sur nous et sur les dons qui sont présents ici ", prie le prêtre au moment de l’épiclèse de la Divine Liturgie de saint Jean Chrysostome.

Le Symbole de Foi de Nicée-Constantinople décrit l’Église comme étant " une, sainte, catholique et apostolique ". L’Église du Christ est une et universelle ; elle s’étend à tous les hommes, à tous les temps, à tous les lieux ; sa foi est celle qui a été reçue toujours, partout, par tous ; elle ne pense et ne vit qu’unanimement : c’est ce qu’exprime le mot " catholique ". L’Église est sainte, non en ce sens que tous ses membres soient effectivement saints, mais parce que la sainteté est la vocation de tous et que l’Église possède et offre aux fidèles les moyens de sanctification. L’Église est apostolique, parce qu’elle se réclame de la tradition des Apôtres et parce que, par le mystère de l’imposition des mains au moyen duquel se transmet tout office pastoral, elle remonte jusqu’à eux.

L’Église comprend beaucoup de personnes qui lui sont en apparence étrangères ou hostiles. Toute personne fidèle à la mesure de lumière qui lui a été donnée participe à la grâce, à la vie du Christ, lors même qu’elle ne connaîtrait pas le Christ ; ces âmes remplies de bonne volonté, quel que soient leur ignorance ou leurs défauts, sont des membres invisibles de l’Église. Car l’Église déborde de tout cadre visible ; aussi ne faut-il pas la concevoir comme une organisation juridique, sous le seul aspect temporel.

Dans la conception orthodoxe, c’est l’Église tout entière qui est infaillible, parce qu’elle est le Corps du Christ ; cette infaillibilité ne repose pas sur une personne, ni même sur une collectivité, tels que les Conciles d’évêques. L’expression de cette infaillibilité est peut-être la plus évidente lorsque les évêques, réunis en Concile universel, prennent une décision librement. Cependant, une décision en matière de foi ou de dogme doit être en quelque sorte entérinée par l’Église tout entière. C’est ainsi que les décisions de certains Conciles auxquels ont participé des évêques orthodoxes, notamment les Conciles d’unification de l’Église d’Orient et de l’Église romaine, en 1274 et en 1438-39, ont été rejetées par le peuple orthodoxe et sont considérées comme invalides.

La tradition orthodoxe professe qu’une vraie communion existe entre les saints glorifiés, tous les défunts et nous-mêmes. Nous n’adorons pas les saints, mais nous pouvons nous adresser à Dieu par leurs prières et nous recommander à leur intercession. En vénérant la mémoire de la Mère de Dieu, celle des Apôtres, des martyrs, des Pères, des saints ascètes et des autres saints, en honorant leurs images et leurs reliques, c’est à Dieu, qui s’est manifesté en eux, que l’on rend hommage. Aussi, nous prions pour les défunts, de même qu’ils intercèdent pour nous, les vivants : car l’Église est aussi la communion des saints, l'union du ciel et de la terre dans la Liturgie qui ne cessera jamais.


L’ÉGLISE


Là où est l’Église, là aussi est l’Esprit de Dieu, et là où est l’Esprit de Dieu, là est l’Église et toute sa grâce.

Saint Irénée de Lyon (IIe siècle)

Il y a beaucoup d’Églises et pourtant il n’y a qu’une Église.
Un homme ne peut avoir Dieu pour Père s’il n’a pas l’Église pour Mère.

Saint Cyprien de Carthage (IIIe siècle)

Le Corps du Christ auquel les chrétiens sont unis par le baptême devient la racine de notre résurrection et de notre salut.

Saint Athanase d’Alexandrie (IIIe siècle)

L’Église est le paradis terrestre dans lequel le Dieu du ciel demeure et se meut.

Saint Germain de Constantinople (VIIIe siècle)

L’Église, cette grande baie par laquelle le Soleil de Justice pénètre dans le monde des ténèbres.

Saint Nicolas Cabasilas (XIVe siècle)

L’Église du Christ n ’est pas une institution, c’est une vie nouvelle avec le Christ et en Christ.

Père Serge Boulgakoff (XXe siècle)

Dans l’opacité du monde déchu, l’Église est la brèche ouverte par la Croix triomphale, et par cette brèche l’amour trinitaire ne cesse de se déverser dans la lumière de la Résurrection.

Olivier Clément (XXe siècle)


Organisation de l’Église orthodoxe

Comme nous l’avons vu, le principe canonique fondamental de l'organisation de l’Église orthodoxe est celui de l'église locale ou territoriale : un seul évêque en un même lieu, formant avec les prêtres et les fidèles un diocèse ; les diocèses vivent leur unité autour de centres d'accord ou de communion entre les églises locales. Il s'agit d'abord des métropoles, puis des Églises autocéphales (c'est-à-dire élisant leur propre primat) ou autonomes (l'élection du primat est confirmée par une Église autocéphale). Les Églises autocéphales correspondent soit à des communautés de civilisation, ayant été ou étant redevenus missionnaires (ainsi Alexandrie pour l'Afrique, Antioche pour le monde sémitique), soit à des communautés nationales. À l'échelle universelle enfin, depuis le schisme du XIe siècle, c'est l’Église de Constantinople, ou le Patriarche œcuménique, dont le siège est à Istanbul (Turquie), qui dispose d'une primauté d'honneur et d'un certain rôle d'initiative et de présidence dans l'ensemble de l’Église orthodoxe.

Se fondant sur le concept de l’église locale, la Tradition orthodoxe a toujours favorisé l’utilisation de la langue locale, la langue parlée par le peuple, comme langue liturgique. Les principales langues liturgiques dans le pays de tradition orthodoxe sont le grec, le slavon, l’arabe, le roumain et l’ukrainien. Le slavon est une langue liturgique utilisée par les l’Églises de Russie, de Serbie et de Bulgarie. Il a été élaboré par les saints Cyrille et Méthode au Xe siècle, au moment de la conversion des premiers peuples slaves au christianisme, et basée sur la langue parlée par le peuple slave autour de Salonique à cette époque. Les communautés orthodoxes occidentales utilisent les langues nationales de leurs pays et les communautés d’immigrés orthodoxes se servent de plus en plus des langues locales, parfois en alternance avec les langues d’origine pour les offices liturgiques.

L’Église orthodoxe comprend aujourd'hui les quatre patriarcats anciens (Constantinople, Alexandrie, Antioche (siège à Damas) et Jérusalem), le patriarcat de Moscou (établi en 1589), les patriarcats de Serbie (1920), Roumanie (1925) et Bulgarie (1953), l'antique Église de Géorgie, dont les origines remontent au IVe siècle, ainsi que les Églises autocéphales ou autonomes dont le primat porte soit le titre d'archevêque (Églises de Chypre, Grèce, Finlande et Albanie), soit celui de métropolite (Église de Pologne, République tchèque et Slovaquie, Amérique et Japon).

Cette organisation canonique en évêchés territoriaux et autocéphales est celle des quatre patriarcats anciens qui avant la séparation de l’Orient et de l’Occident, formaient avec Rome la " Pentarchie ", ainsi que des Églises de constitution plus récente, en Europe de l'Est, généralement situées dans des terres traditionnellement orthodoxes. Cependant, il n'en va pas encore ainsi partout ailleurs. En Europe occidentale, en Amérique du Nord et en Australie, continents où les communautés orthodoxes se sont implantées à plus grande échelle au XXe siècle, l'application du principe territorial ne se trouve qu'à peine ébauchée. Ainsi en 1970 une Église autocéphale a été proclamée en Amérique où l’Église orthodoxe est présente depuis la fin du XVIIIe siècle, mais cette Église, l’Église orthodoxe en Amérique, ne réunit qu'une minorité, importante il est vrai, des fidèles du continent américain. Si des organismes de coordination s'établissent peu à peu au niveau des épiscopats de différents pays, les diocèses restent encore fondés sur des critères ethniques et ils dépendent généralement de leurs Églises autocéphales d'origine.


L’Orthodoxie en Europe d’expression française

Pendant le premier millénaire du christianisme, toute l’Europe, occidentale comme orientale, faisait partie de la même Église " indivise ". Le Grand Schisme de 1054 a divisé une première fois l’Église en deux grandes parties et une seconde fracture s’est effectuée en Occident lors de la Réforme. L’Église orthodoxe garde précieusement la mémoire de l’Église indivise, avec l’espoir de retrouver de nouveau cette unité de la confession de la foi entre l’Orient et l’Occident.

Cette mémoire de l’Église se manifeste par exemple dans la commémoraison des saints occidentaux du premier millénaire, qui sont généralement fêtés le même jour en Orient et en Occident, par exemple Sainte Geneviève de Paris, le 3 janvier. Il en va de même pour les grands papes de cette période, comme saint Léon le Grand, considéré comme un Père de l’Église par l’Église orthodoxe, et le pape saint Grégoire le Grand, à qui est attribuée la Liturgie des saint Dons présanctifiés, célébrée en semaine pendant le Grand Carême.

Après la rupture entre l’Occident et l’Orient, les rapports entre les deux branches de l’Église sont restés tendus, sinon ouvertement conflictuels, pendant des siècles. Les communautés de tradition orientales en Occident, notamment à Ravenne et en Sicile, disparaissent avec le temps, de même que la communauté des Bénédictins d’Amalfi installée au Mont Athos. Les croisades, la prise de Constantinople en 1204 et l’échec des tentatives d’union entre l’Orient et l’Occident au XIIIe et au XVe siècles vont douloureusement agrandir le fossé entre les deux.

Ce n’est qu’à l’époque moderne que des communautés issues de pays de tradition orthodoxe s’établissent en Europe occidentale. En 1816, à la suite de l’occupation de Paris par les troupes russes, une paroisse russe est instituée dans la capitale, et en 1820 la première paroisse grecque en France est fondée à Marseille. Les premières églises orthodoxes en France remontent au milieu du XIXe siècle : l’église de la Dormition de la Mère de Dieu à Marseille en 1845 ; la première chapelle roumaine à Paris en 1853 ; et en 1860, avec le rattachement de Nice à la France, l’église Sainte-Alexandra qui devient la première église russe érigée en France. L’église russe de Saint-Alexandre-de-la-Néva à Paris a été inaugurée en 1861 et l’église grecque Saint-Étienne, également à Paris, en 1895.

Avant la Première guerre mondiale, la présence orthodoxe en Europe occidentale a son origine surtout dans les activités commerciales et les relations diplomatiques et culturelles entre les pays européens et ceux de tradition orthodoxe. Avec la Première guerre mondiale et les grands événements politiques et sociales qui en résultent en Russie et en Turquie, ce sont les arrivées massives d’immigrants et de réfugiés qui ont alimenté les communautés orthodoxes : deux vagues d’immigrants grecs, l’une après l’occupation de la Dodécanèse par l’Italie, l’autre après la catastrophe d’Asie mineure, où plus d’un million de Grecs sont massacrés ou expulsés par l’état turc ; puis, à partir de 1920, c’est l’arrivée de réfugiés russes fuyant la révolution bolchevique. À ces communautés se sont ajoutés des Bulgares, des Serbes et des Roumains, surtout après la Deuxième guerre mondiale, et des Arabes chrétiens, dont le nombre en Occident a considérablement augmenté suite aux conflits au Liban.

Le Métropolite Euloge, exarque du Patriarcat de Moscou installé a Paris en 1923, a été le premier évêque orthodoxe résident en Europe occidentale. Sous son omophore, la communauté russe, regroupée autour de l’Église, s’est caractérisée par une activité intense dans plusieurs domaines : les arts et les publications, l’entraide, les associations culturelles et sociales, la théologie, l’iconographie et la musique sacrée. En 1925, des jeunes théologiens et liturgistes d’origine russe fondent la Confrérie Saint-Photius à Paris, dont le but était d’œuvrer pour l’indépendance et l’universalité de l’Orthodoxie. Parmi les grands théologiens et liturgistes associés à la Confrérie Saint-Photius figurent Eugraph Kovalevsky (devenu plus tard Mgr Jean de Saint-Denis), le liturgiste et musicologue Maxime Kovalevsky, le théologien Vladimir Lossky et l’iconographe Léonide Ouspensky.

En 1925 également l’Institut de théologie orthodoxe Saint-Serge a été fondé pour dispenser un enseignement théologique, d’abord en russe, et plus tard en français. L’Institut Saint-Serge servait les besoins croissants de la communauté russe en France, puis, avec le temps, des orthodoxes partout en Occident. Le premier et, pendant longtemps, le seul institut de théologie orthodoxe en Europe occidentale, l’Institut Saint-Serge a joué et continue de jouer un rôle capital dans l’enseignement théologique en Europe occidentale et même en Amérique du Nord. Parmi les grands théologiens de l’Institut Saint-Serge sont le père Serge Boulgakov et Paul Evdokimov, ainsi que les pères Jean Meyendorff et Alexandre Schmemann, qui ont également enseigné au Séminaire Saint-Vladimir à New-York.

En même temps que les communautés d’immigrés des pays orthodoxes renforçaient la présence orthodoxe en Occident, des Occidentaux " de souche " découvrent l’Église orthodoxe et s’y joignent, créant, avec les enfants d’immigrés nés en Occident, une demande pour des services liturgiques en français et en d’autres langues occidentales. La première célébration de la Divine Liturgie en français a eu lieu à l’Institut Saint-Serge en 1927 et en 1928 la responsabilité de la première paroisse orthodoxe de langue française a été confiée au père Lev Gillet, connu par la suite par son pseudonyme, " Un moine de l’Église d’Orient ". Après la Deuxième guerre mondiale, des paroisses orthodoxes entièrement francophones sont constituées sous l’impulsion du père Eugraph Kovalevsky, pratiquant un rite occidental, et à partir de années 70, l’utilisation du français comme langue liturgique devient de plus en plus répandue dans beaucoup de paroisses de rite byzantin.

Le monachisme orthodoxe est largement représenté en France. Le premier monastère orthodoxe en Europe occidentale, Notre-Dame-de-Toute-Protection à Bussy-en-Othe (Yonne), a été fondé en 1946. Aujourd’hui, il y en France une vingtaine de communautés monastiques orthodoxes, une en Suisse et deux en Belgique. Il y a aussi une communauté de laïcs orthodoxes, présidée par un prêtre et son épouse : le Centre d'études et de prière Sainte-Croix en Dordogne. Sainte-Croix pratique la vie communautaire et la prière commune et il partage la foi en proposant des sessions, des retraites et des rencontres ouvertes à tous.

Pour des raisons historiques, les paroisses, monastères et centres orthodoxes en Europe occidentale se regroupent en diocèses selon leurs origines ou les circonstances de leur fondation et dépendent de leurs patriarcats respectifs. La concertation formelle entre les différentes juridictions orthodoxes représentées en France remonte à 1939. Un comité permanent inter-orthodoxe a été fondé en 1943 et en 1967 est créé le Comité inter-épiscopal orthodoxe, devenu l’Assemblée des évêques orthodoxes de France en 1997. Instance réelle de concertation, de coordination et de communication, l’Assemblée des évêques orthodoxes, présidée par le représentant du Patriarche œcuménique en France, regroupe les évêques orthodoxes canoniques résidant en France.

En parallèle et dans un esprit de collaboration, la Fraternité orthodoxe en Europe occidentale est une association orthodoxe qui s’est donné pour tâche depuis une quarantaine d’années de susciter des échanges et un rapprochement entre les orthodoxes de toutes origines. Elle organise notamment des congrès trisannuels réunissant des orthodoxes de toute l’Europe occidentale pour lier amitié, prier et réfléchir ensemble sur les grands thèmes touchant l’Orthodoxie.

On compte aujourd’hui environ 150,000 orthodoxes et 150 lieux de culte orthodoxe en France, dont une vingtaine dans la seule ville de Paris.

En Belgique, la première chapelle orthodoxe à Bruxelles date de 1862. Au fil des ans, aux orthodoxes d'origine grecque, russe, ukrainienne, serbe, roumaine et bulgare appartenant à diverses Églises locales se sont joints des Belges de souche. L’Église orthodoxe en Belgique compte cinq évêques, 37 paroisses et environ 50,000 fidèles. L'État belge a reconnu officiellement le culte orthodoxe en 1985. Une loi de 1988 prévoit l'organisation pratique de l'exercice de ce culte ; elle stipule que l'organe représentatif de l'ensemble de l'Église orthodoxe est le Métropolite-Archevêque du Patriarcat œcuménique de Constantinople ou son remplaçant. Des cours de religion orthodoxe sont enseignés dans les écoles officielles du pays qui en ont formulé la demande. Depuis le début de 1994 l'Église orthodoxe a ses propres émissions aux deux radios officielles belges.

En Suisse, l’événement fondateur et décisif de l’établissement de la foi chrétienne est sans aucun doute le martyr de la légion thébaine. Saint Maurice et ses 2,000 compagnons ont péri dans le défilé d’Agaune au IIIe siècle, plutôt que de sacrifier à l’empereur Maximien. L’écho en fut si considérable que saint Athanase d’Alexandrie est venu se recueillir sur le tombeau des martyrs lors d’un de ses exils. Au VIe siècle saint Maire a tant fait pour la conversion des habitants de l’actuelle Suisse romande, qu’on le compare à saint Martin de Tours. Plus tard, le Jura se peuple d’ermites et les monastères fleurissent. La Suisse romande faisait alors partie des métropoles de Besançon et de Lyon ; c’est ainsi que la Suisse romande est née à la foi dans l’Église des Gaules, la plus importante des églises locales d’Occident du Ve au VIIIe siècles.

L’Orthodoxie a repris pied en Suisse au XVIIIe siècle, lors du passage des troupes du maréchal russe Souvaroff durant les guerres de la Révolution française. La paix revenue, les estivants russes fortunés lancent ce qui allait devenir une des industries les plus florissantes du pays, le tourisme. Établis le long du lac Léman, ils construisent deux églises, à Vevey et à Genève. Au XXe siècle, l’émigration grecque des armateurs, puis des ouvriers, construit une église à Lausanne en 1922, puis le centre du Patriarcat de Constantinople à Chambésy près de Genève et fonde d’autres paroisses en Suisse alémanique. Dès les années 30, le Patriarcat de Moscou établit des paroisses à Zurich, puis à Genève et à Payerne, ainsi qu’un monastère à Dompierre. Les émigrés de l’ancienne Yougoslavie forment environ soixante pour cent des quelques 80,000 à 100,000 orthodoxes vivant en Suisse. Aujourd’hui, il existe en tout trente communautés orthodoxes en Suisse.

Après la longue coupure suite au schisme du XIe siècle entre l’Église d’Orient et l’Église d’Occident, la foi orthodoxe est devenue, depuis un siècle et demi, une réalité vivante en Europe occidentale. Aux commerçants, représentants diplomatiques, artisans et réfugiés des pays de tradition orthodoxe établis en Europe occidentale se sont joint des occidentaux " de souche, " à la recherche de l’expression authentique du christianisme. Participant activement au mouvement œcuménique, l’Orthodoxie occidentale contribue à la redécouverte par les chrétiens d’autres confessions de la tradition théologique, liturgique et spirituelle de l’Église indivise du premier millénaire, à travers, par exemple, la sublimité de la liturgie byzantine, la beauté des icônes et des chants orthodoxes, la prière de Jésus et la spiritualité hésychaste.


L’Orthodoxie en Amérique du Nord et au Québec

L’Orthodoxie a été introduite en Amérique du Nord par des missionnaires russes œuvrant dans les Îles aléoutiennes et en Alaska, alors possession Russe, à partir de 1794. Beaucoup d’Aléoutes et d’Inuit sont devenus chrétiens à cette époque, et aujourd’hui encore, l’Alaska est un haut lieu de la présence orthodoxe en Amérique du Nord.

Cette activité missionnaire a aussi donné à l’Amérique du Nord ses premiers saints orthodoxes : saint Germain d’Alaska (+1837), saint Innocent d’Alaska (+1879), Pierre l’Aléoute (martyrisé en 1815), et saint Tikhon (+1925). Saint Tikhon, évêque de l’Amérique du Nord, y compris le Canada, entre 1898 et 1905, est devenu patriarche de Moscou en 1917 et il est décédé en 1925 aux mains des Soviétiques.

Aux États-Unis continental et au Canada, ce sont les immigrants des pays de culture orthodoxe qui ont implanté la foi orthodoxe : d’abord les Grecs, dès le milieu du XIXe siècle – la première communauté orthodoxe grecque a été fondée en 1864 à la Nouvelle-Orléans -, puis les Ukrainiens et les Russes au début du XXe siècle, et, en plus petit nombre, des Roumains, Bulgares et Serbes, suivis d’une deuxième vague des pays de l’Europe de l’Est après la deuxième guerre mondiale, et finalement les chrétiens arabes, suite à l’intensification des conflits au Moyen-Orient dans les années 1970.

On compte aujourd’hui environ 600,000 à 700,000 orthodoxes au Canada, dont un grand nombre dans les provinces de l’Ouest et les grandes villes du Québec et de l’Ontario. Il y a environ 85,000 orthodoxes au Québec, où la présence orthodoxe est surtout visible à Montréal. La région montréalaise compte une vingtaine de paroisses orthodoxes, dont onze paroisses grecques (Patriarcat œcuménique), trois paroisses ukrainiennes (Église orthodoxe ukrainienne du Canada), trois paroisses arabes (Patriarcat d’Antioche), une du Patriarcat de Roumanie et une du Patriarcat de Serbie. L’Église orthodoxe en Amérique a quatre paroisses à Montréal : une russe, une francophone, une anglophone et une roumaine.

Dans les années 1950, le clergé multi-ethnique desservant les paroisses montréalaises a fondé l’Association du clergé orthodoxe du Québec, qui organise certaines activités communes. C’est surtout durant le Grand Carême que se manifeste cette unité orthodoxe ; les vêpres solennelles sont célébrées en commun le premier dimanche du Carême, le " Dimanche de l’Orthodoxie ". L’Association du Clergé soutient aussi des conférences, un concert des chorales orthodoxes et une émission de radio, " Regards Orthodoxes ", diffusée chaque dimanche après-midi, de 14h00 à 15h00, sur les ondes de Radio Ville-Marie (91,3 FM à Montréal, 100,3 FM à Sherbrooke). Cette émission, animée par une équipe de bénévoles, a pour but de mieux faire connaître l’Orthodoxie au grand public. Depuis janvier 1998, grâce aux efforts de l’Association du clergé et de laïcs orthodoxes, l’Université de Sherbrooke offre un Certificat de théologie orthodoxe à son campus de Longueuil. Les cours sont offerts aux orthodoxes et à toute personne désireuse de se familiariser avec la théologie orthodoxe.

La vie monastique orthodoxe connaît un modeste début au Québec depuis quelques années. La Communauté monastique de Saint-Séraphim-de-Sarov, qui a son siège à Rawdon, au nord-est de Montréal, regroupe plusieurs moines, vivants à Rawdon, Montréal, Sherbrooke, Amos, Halifax et St-Eusèbe-de-Témiscouata (Bas-du-Fleuve). Aussi, une petite communauté de moniales venues de Grèce, augmentée de novices québécoises, a fondé un monastère près de Lachute.

Bien que la communauté orthodoxe francophone soit modeste, la Divine Liturgie et les offices orthodoxes sont célébrés en français régulièrement à Montréal, Rawdon, Amos et St-Eusèbe-de-Témiscouata.


Les Orthodoxes dans le Monde

PAYS DE TRADITION ORTHODOXE


Russie2

50 000 000
à 80 000 000

Chypre2

550 000

Ukraine3

20 000 000

Liban

370 000

Roumanie2

19 800 000

Syrie1

300 000

Grèce2

9 000 000

Albanie2

165 000

Serbie2

8 000 000

Rép. Tchèque
et Slovaquie

60 000

Bulgarie2

6 000 000

Estonie3

75 000

Biélorussie

6 000 000

Finlande3

58 000

Moldavie

3 000 000

Égypte1

18 000

Géorgie2

2 000 000

Jérusalem1 et
Cisjordanie
15 000
Macédoine

1 000 000

Turquie1

5 000

Pologne2

1 000 000

Sinaï2

100

DIASPORA


États-Unis4

5 000 000

Suède

94 000

Australie

1 000 000

Mexique4

75 000

Canada4

680 000

Chili

70 000

Allemagne

660 000

Bénélux

67 000

Brésil

180 000

Italie

32 000

France

150 000

Suisse

23 000

Argentine

140 000

   

MISSIONS


Kenya

400 000

Afrique du Sud

38 000

1 Sièges des quatre patriarcats traditionnels : Constantinople, Alexandrie, Antioche et Jérusalem.
2 Église autocéphale.
3 Église autonome.
4 Le statut d’Église autocéphale a été accordée à l’Église orthodoxe en Amérique par le Patriarcat de Moscou en 1970 ; elle regroupe environ un million des cinq à six millions d’orthodoxes en Amérique du Nord.


 Pour aller plus loin

Clément, Olivier, L'Église orthodoxe. PUF (Que Sais-Je), 1998.
Evdokimov, Paul, L’Orthodoxie. Desclée de Brouwer, 1979.
Lossky, Vladimir, Essai sur la théologie mystique de l'Église d'Orient. Cerf, 1990.
Meyendorff, Jean, Initiation à la théologie byzantine. Cerf, 1975.
Meyendorff, Jean, L’Église orthodoxe hier et aujourd’hui. Seuil, 1995.
Ware, Timothy, L'Orthodoxie : L'Église des sept conciles. Desclée de Brouwer, 1998.
Yannaras, Christos, La foi vivante de l’Église : Introduction à la théologie orthodoxe. Cerf, 1989.


 

Dernière modification: 
Lundi 8 mai 2023